La perquisition civile : un outil efficace et dissuasif en cas de pratique déloyale d’un concurrent
Nombreuses sont les entreprises qui ont déjà été confrontées à des concurrents indélicats se livrant à des pratiques déloyales, comme par exemple la reprise – plus ou moins à l’identique – d’éléments de savoir-faire. Cela peut consister dans la reprise de conditions générales de vente ou d’utilisation, de clauses de contrats, de maquettes, plans, schémas, ou encore des supports commerciaux comme des réponses à des appels d’offre.
Or, ce savoir-faire constitue un réel avantage concurrentiel et représente une valeur économique pour une entreprise qui a investi des moyens humains et financiers importants pour conceptualiser et réaliser ces documents, puis les tester, les éprouver, les modifier au cours du temps pour arriver à un résultat optimal.
La reprise de tels documents par un concurrent – qualifiée par les Tribunaux de parasitisme économique – porte donc gravement atteinte aux investissements réalisés par l’entreprise, qui voit son savoir-faire « aspiré » et « pillé » par un tiers.
Ces agissements sont parfois imperceptibles, voire difficilement identifiables. Mais ils peuvent aussi être mis à jour par le hasard ou l’imprudence de son auteur. Dans tous les cas, il est souvent difficile d’en connaitre l’étendue précise : s’agit-il d’un incident isolé ? Ou bien d’une manœuvre de pillage de plus grande ampleur ?
Pour le savoir, il existe un outil judiciaire – trop peu souvent utilisé par les entreprises – mais particulièrement efficace pour obtenir la preuve de la captation et de son étendue : il s’agit de la perquisition civile prévue et encadrée par l’article 145 du Code de procédure civile. Ce texte prévoit que « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ».
Cette procédure est une arme particulièrement redoutable car elle permet :
– Un effet de surprise, puisque l’entreprise saisie n’est informée de la procédure qu’au moment où l’huissier et l’expert se présentent sur place pour l’exécuter. Il faudra pour cela justifier auprès du juge de circonstances particulières, comme un risque de dissimulation des preuves par le concurrent.
– D’investiguer directement dans les locaux de l’entreprise, sur les serveurs et ordinateurs. L’assistance d’un expert informatique – qui doit être prévue et encadrée par l’ordonnance – sera alors particulièrement utile sur les investigations techniques.
– De conserver les preuves saisies, pour ensuite s’en servir dans le cadre d’un procès au fond, et justifier de demandes indemnitaires sur le fondement d’une concurrence déloyale et/ou d’agissements parasitaires.
Cette saisie pouvant potentiellement porter atteinte au secret des affaires, la rédaction de la « requête 145 » doit donc être particulièrement précise dans son objet, et strictement encadrée dans ses effets.
Les Tribunaux rappellent fréquemment que la mesure de perquisition civile ne doit pas conduire à ordonner une mesure générale d’investigation qui ne serait pas légalement admissible (Cass. com., 5 avr. 2018, et Cass. 2e civ., 15 nov. 2012).
Ne laissez donc pas vos concurrents s’emparer de votre savoir-faire ; des outils sont là pour vous protéger.